
Existe-t-il le mouton à 5 pattes ?
Entre entreprises montantes, « jeunes et dynamiques » et jeunes diplômés « ultra-motivés », l’exigence sur le marché du travail est devenue une source d’angoisses, aussi bien d’un côté du bureau que de l’autre. Les exigences sont de plus en plus élevées, on recherche « la perle rare ». Le recruteur attend davantage d’implication, plus de diplômes, des compétences de senior pour des salaires de junior.
Côté candidat, cela engendre une pression intense vis-à-vis de sa recherche et des entretiens qu’il parvient à décrocher. Il vit un parcours du combattant pour décrocher un premier entretien et éventuellement un deuxième, et cela le pousse à surinvestir pour se distinguer.
Ces angoisses et ces attentes entraînent aussi une part d’idéalisation, aussi bien chez le candidat que chez le recruteur. Or, en idéalisant, on entre dans une optique de séduction qui, bien qu’essentielle, peut-être nocive à trop forte dose. Trop d’attentes ou de concessions dans le but de « plaire » entraînent des non-dits.
Je l’ai vécu, et c’est d’ailleurs ce qui m’a donné envie d’écrire cet article. Je me suis rendu compte à travers les témoignages que j’ai reçu par la suite que j’étais loin d’être la seule personne ayant été touchée par ces difficultés.
Un entretien, puis un deuxième… Et soudain, la communication est rompue. Le candidat reste dans l’attente d’un retour du recruteur, mais celui-là ne viendra jamais. Le silence est ce qu’il y a de plus nocif pour le candidat.
Pour ma part, je fais partie de cette génération X, celle qui s’est construite avec à l’esprit que rien n’est acquis, mais avec la croyance viscérale que le succès couronnait toujours le travail et la persévérance.
Lorsque je suis arrivée sur le marché du travail, j’ai dû m’accrocher et me donner à fond pour obtenir ma chance. Le monde du travail, entre temps, s’est largement métamorphosé, de même que la société : on privilégie désormais la variété des expériences plutôt que la longévité au sein d’une entreprise.
J’ai cru pendant longtemps que mon profil et mon vécu professionnel étaient devenus des freins pour mon accession au marché du travail. Je me suis retrouvée à faire de nombreuses concessions, notamment sur mes prétentions salariales, avec la volonté d’obtenir le poste que je voulais. Puis, en entendant des femmes de quarante ans comme de vingt-cinq ans raconter qu’elles étaient confrontées aux mêmes problèmes que moi, j’ai réalisé que le problème était d’une nature différente.
Cela engendre beaucoup de frustrations, autant pour le candidat, qui ne sait pas ce qui a causé son écartement, que pour l’entreprise recrutante, qui voit ses jeunes recrues s’épuiser très vite à la tâche, entraînant burn-out et démissions… ce qui la pousse à encore plus d’exigences.
Osez faire de véritables retours aux candidats rencontrés. C’est l’occasion de prendre du recul, de redéfinir ses attentes et mettre les choses à plat.
Communiquez, échangez, donner à votre candidat et à vous-même l’opportunité d’être au clair sur vos ambitions communes.
Finalement, je m’interroge encore : est-ce qu’il existe le mouton à cinq pattes ?
C’est difficile de donner une réponse à cette question, mais mon expérience m’a permis de comprendre que, pour avoir une perle rare dans son équipe, il est essentiel d’apprendre à découvrir l’autre.
Car, avant tout, un entretien d’embauche est une rencontre.